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Les genres poétiques

Dès la première moitié du XIIe siècle, les principaux genres poétiques représentatifs de la poésie des troubadours existent déjà. Pierre Bec classe les genres pratiqués par les troubadours en deux grandes catégories : les genres aristocratiques tel que la cançon, la sirventés, la tençon, le planh ou encore  le partimen, et les genres populaires tels que l’alba, ou la pastorela.



  • La cançon
  • La tençon
  • La sirventès
  • Le planh
  • L'alba
  • La pastorela

La cançon

La cançon est le genre phare de la poésie occitane médiévale. Genre aristocratique par excellence, elle est avant tout et de façon fondamentale un poème d’amour, destiné à être chanté. L’amour en est le thème, la substance et l’argument, qu’il soit évoqué à travers les codes esthétiques de la fin’amor, comme dans la majeure partie des cançons, qu’il soit le sujet d’une réflexion métaphysique, esthétique, soit amère (Can vei la lauzeta mover), soit heureuse, ou encore le cadre et le prétexte d’une création abstraite (Farai un vers de dreit nien) aux portes du non-sens. Certaines cançons peuvent être comprises à plusieurs degrés, et posséder parfois un double sens qui peut être en rapport avec le siècle, ainsi l’évocation de la Terre Sainte et de la croisade dans l’œuvre de Jaufre Rudel.

Elle se définit avant tout comme un poème dont les vers sont organisés en strophes, les coblas. Une cançon présente rarement moins de 20 vers et rarement plus de 60. Le nombre de coblas est variable, tout comme le nombre de vers par cobla. Plusieurs schémas rythmiques sont possibles, selon l’effet que l’artiste cherche à rendre : alternance de vers longs et brefs dans une même strophe (toutes les strophes ayant en général la même versification), insertion de coblas plus courtes à des fins illustratives, un quatrain au milieu des sizains par exemple (Per qu'ieu autra non azori). Les rimes elles aussi donnent lieu à un jeu d’effets, selon que toutes les coblas présentent des rimes identiques tout au long de l’oeuvre (unisonans), que les coblas soient accouplées deux à deux, chaque binôme présentant des rimes identiques (doblas) ou qu’au contraire chaque cobla possède son propre système de rimes (singulars).

La tençon

Le verbe tençonar signifie en occitan ancien “discuter, débattre, avoir une controverse”, dans un sens qui peut être proche de l’idée de dispute. Une tençon, genre haut, est donc une oeuvre poétique qui prend la forme d’une discussion, voire d’une controverse entre deux auteurs, aboutissant finalement à une joute poétique, selon des codes pré-établis et sur des thèmes récurrents, généralement la fin’amor, ses règles et ses contraintes. L’auteur, met en scène cet échange virtuel avec son interlocuteur, qui peut se trouver très loin de là, mais dont la contre-argumenation est énoncée, permettant des développements intellectuels qui semblent issus de l’échange même.

Ce genre nous amène au coeur de la problématique de l’héritage des troubadours, puisqu’on le retrouve chez d’autres grands poètes du Moyen Âge, pourtant extérieurs à l’Occitanie, de façon directe ou inspirée. On citera ainsi  le Champenois Chrétien de Troyes (vers 1135-1185) qui connut sans doute l’oeuvre des troubadours à la cour de Marie de Champagne, fille d’Aliénor d’Aquitaine, et surtout le Toscan Dante Alighieri (1265-1321), grand admirateur de l’oeuvre des troubadours, qu’il contribua à faire connaître à l’échelle européenne. On parle de partimen ou joc partit pour désigner une variante de tençon qui se présente sous la forme d’un dilemme – généralement sur un point d’amour courtois – posé par un troubadour à un de ses confrères, lui laissant le choix d’opter pour l’une ou l’autre réponse, et gardant pour soi l’autre option. La pièce constitue donc en une sorte d’échange intellectuel, assorti de rappel des codes de la fin’amor et illustré d’exemples personnels, davantage qu’en une joute verbale comme l’est généralement la tençon. Un célèbre partimen du début du XIIIe siècle nous est parvenu, entre le Poitevin Savaric de Mauléon et le Limousin Prevost de Limoges, sur l’attitude à adopter avec sa dame, sur des problématiques de fidélité notamment.

La sirventès

Une sirventès est un poème satirique, polémique, également organisé de façon générale en coblas, en strophes. A classer parmi les genres aristocratiques, la sirventès possède une dimension sociale, reliée à la réalité et à l’époque, qu’aucun autre genre troubadouresque ne possède véritablement. Les sirventès peuvent attaquer n’importe quel acteur de la société : l’Église, la chevalerie, les gens de robe. Parfois, le propos est élargi :  décadence des moeurs, art de la guerre ou de l’amour...

Riche d’une vraie dimension politique, quoique soumise, comme tout l’art troubadouresque, à des codes et des lieux communs immuables, la sirventès est parfois une oeuvre diplomatique, permettant l’expression d’une tension politique entre tel ou tel parti, l’attitude de tel potentat face à l’imminence d’une campagne militaire, parfois même un ultimatum ou un appel à la croisade, formant en quelque-sorte le contrepoint séculier des prédications religieuses publiques. Le Périgourdin Bertran de Bòrn (vers 1140-1215), seigneur d’Hautefort, gentilhomme belliqueux et immense poète occitan, fut l’un des maîtres du genre. Ses sirventès politiques figurent comme un sommet de l’art poétique occitan médiéval.  Parmi les oeuvres de ce type les plus connues, citons la terrible pièce écrite par le Toulousain Guilhèm Figueira (vers 1195-1250), exilé en Lombardie après la croisade albigeoise, parfois désignée d’un de ses couplets : Roma trichairitz, terrible diatribe de tout un peuple contre l’attitude du Pape, l’impureté de l’Église et du clergé romain et le atrocités perpétrées. L’Auvergnat Pèire Cardenal (vers 1180-1278), clerc devenu poète à la cour de Toulouse, signa lui aussi des pièces parmi les plus virulentes contre les moeurs du clergé catholique. D’un autre côté, une sirventès peut aussi attaquer ad hominem un personnage nommé et identifié. Citons dans ce registre la fameuse sirventès de Pèire d’Alvèrnhe (actif vers 1150-1170) contre douze de ses confrères troubadours, passés en revue et copieusement moqués et critiqués. Certaines sirventès sont assimilables à des chansons de croisade, soit de véritables prêches chantés en langue vernaculaire, appelant à la libération de la Terre Sainte et fustigeant les lâches non-désireux de prendre les armes pour la foi. Bertran de Born s’est particulièrement illustré dans ce registre. La chanson de croisade fut, plus tard, largement reprise dans la poésie de langue d’oïl.

Le planh

Genre élevé, le planh (“plainte” ou “complainte” en occitan) est un chant funèbre organisé en coblas, généralement composé à la mémoire d’un grand personnage, mais pas seulement. Nous conservons plusieurs planhs écrits pour la mémoire de personnages anonymes, oubliés.
Parmi les planhs les plus connus, dédiés à de hauts personnages, citons celui du Limousin Gaucelm Faidit (deuxième moitié du XIIe-début du XIIIe siècle), Fortz causa es que tot lo major dan, pleurant la mort de Richard Coeur-de-Lion, roi d’Angleterre mais surtout duc d’Aquitaine et de Normandie, en 1199. En 1209, c’est le Dauphinois Guilhèm Augier Novella qui signe la pièce Cascus plor e planh son damnatge, dédié à la mémoire de Raymond-Roger Trencavel (1185-1209), vicomte de Béziers, victime politique de la croisade albigeoise dont il devint un des martyrs.

Dès les années 1130, le troubadour et jongleur gascon Cercamon avait inauguré le genre, par son planh dédié à la mémoire de Guillaume X d’Aquitaine, Lo plaing comens iradamen. Citons pour mémoire Fortz tristors es e salvatj'a retraire  adressé par le Languedocien Guilhèm d’Autpol à la mémoire du roi de France saint Louis IX, mort à Tunis en 1270. Par la suite, plusieurs poètes occitans ont dédié un planh à un autre artiste connu d’eux, ou par sa renommée. Citons l’oeuvre S'anc jorn aqui joi e solaz que Guiraud de Bornelh écrit en 1173 à la mémoire de l’illustre Raimbaud d’Aurenga, grand seigneur provençal et artiste fameux, celle du Languedocien Pons Santolh pour la mort de Guilhèm Montanhagol ou encore les trois planhs  (dont un de Bertran d’Alamanon) déplorant la fin du troubadour provençal Blacas de Blacas...
Comme il est d’usage dans la lyrique troubadouresque, le planh est construit selon un schéma conventionnel à peu près immuable : après un appel au deuil et à l’expression de la souffrance, les qualités et la lignée du défunt sont détaillés, puis ses vertus forcément uniques, qui ne se retrouveront plus chez quiconque après lui (ainsi Gaucelm Faidit  n’hésite pas à affirmer que les exploits de Richard Coeur-de-Lion au cours de la troisième Croisade furent tels que jamais aucun roi après lui n’osera sans doute repartir en Terre Sainte). L’oeuvre s’achève généralement sur une prière pour le salut de son âme, avant une nouvelle déploration d’une perte irréparable.

L'alba

Genre majeur de la lyrique troubadouresque, ayant donné lieu à des oeuvres majeures, l’alba (aube) est cependant classée parmi les genres non-aristocratiques. Les aubes sont à subdiviser en deux grandes catégories, intrinsèquement différentes : l’alba profane et l’alba religieuse.
L’alba profane, probablement la plus emblématique du genre, met en scène la séparation de deux amants avec l’arrivée de l’aube mettant fin à la nuit complice qui protégeait leurs amours adultérines mais véritables. L’aube, annoncée tout à la fois par le cri de la gaita, le guetteur de la tour, et par le chant des oiseaux, ramène avec le jour les contraintes et codes sociaux, ainsi que le mari légitime de l’amante, généralement seigneur des lieux, avec tout ce que cela peut impliquer en terme de représailles.

Illustration saisissante de la subtance même de la fin’amor, l’alba place l’amour vécu de façon sincère et totale au-dessus des sacrements et de la morale commune. La nuit, période d’effacement de ces codes, peut seule garantir, par son obscurité, la tranquilité des ébats des amants, généralement au coeur d’un jardin, autre lieu porteur d’une symbolique très forte dans la pensée médiévale. Les albas occitanes les plus connues sont la sublime Reis glorios, du Périgourdin Guiraud de Bornelh (vers 1140-1215), clerc limousin ayant oeuvré en Aragon et en Castille que Dante considérait comme le meilleur des troubadours, Gaita ben gaiteta del castel, du Provençal Raimbaud de Vaqueiras (fin XIIe siècle), Us cavalier si jazia, que l’on attribue parfois à un autre Provençal, Bertran d’Alamanon, ou encore En un vergier, oeuvre anonyme d’une très grande beauté. Tout comme Reis glorios, elle nous est du reste parvenue avec sa mélodie. Dans les albas religieuses, la problématique est inversée.

Oeuvres dans lesquelles la figure de la Vierge remplace celle de la dame, les albas religieuses expriment le désir de voir revenir le matin, dissipant les ténèbres qui symbolisent les errements, les tâtonnements de l’homme égaré et soumis à la tentation. Le jour, au contraire, semble se confondre avec la gloire divine, qui fait de la nuit un simple mauvais souvenir. Citons entre autres, parmi les oeuvres de ce type, Vers Dieus el vostre nom e de Sainta Maria de Folquet de Marselha, évêque de Toulouse (vers 1150-1230).

La pastorela


Genre popularisantGenre non-aristocratique, la pastorela met en scène un galant - parfois un berger, parfois un chevalier - qui fait la rencontre d’une bergère dans un lieu bucolique, entamant avec elle une forme convenue de badinage amoureux. Les motifs peuvent varier d’une oeuvre à l’autre, la bergère pouvant se montrer tantôt farouche, tantôt moins. Il peut arriver que l’issue en soit violente. La pièce L'autrier, a l'issida d'abriu de Marcabru serait, selon Pierre Bec, l’attestation la plus ancienne d’une pastorela occitane.

La pastorelaLa pastorela prend le contre-pied des codes de la fin’amor ce qui a conduit à la classer parmi les genres non-nobles. L’amour y est moins présent que le désir, dont les pulsions peuvent s’exprimer de façon très crue. Le badinage ne fait guère que camoufler un rapport basé sur la recherche immédiate de la séduction, débouchant sur le sexe et rien de plus. La pastorela est un genre qui se rattache plus largement au genre de la poésie pastorale, exaltant la naïveté et la simplicité des plaisirs de l’amour dans une campagne idéalisée, peuplée de bergers libres de laisser libre cours à leurs sens. On pense notamment aux Idylles de Théocrite. La pastorela connut un très grand succès en domaine d’oïl, sous le nom de pastourelle, et fut grandement illustré par les trouvères. Une de ses formes les plus abouties est le Jeu de Robin et Marion d’Adam de la Halle (1286). 

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